De nombreux enfants, confrontés à l’adversité dès leurs premières années, sont parfois contraints à une vie sans enfance. C’est le cas de certains enfants en situation de rue, dont les microtraumatismes de la carrière d’errant impactent leur développement psychoaffectif, mais aussi leur processus d’identisation. Alors que la confrontation à leur propre mort est peu fréquente, la multitude des cas de traumas complexes (DESNOS, Disorder of stress non otherwise specified) que traînent ces victimes des institutions de socialisation nous invite à inscrire la psychotraumatologie dans la clinique de la rue.

Après avoir fait le point sur les controverses théoriques qui nourrissent les conjectures sur le traumatisme psychique, nous allons examiner l’actualité sur le trauma complexe et les limites transparaissant dans la nosographie (DSM). L’objectif de cette étude est d’analyser les intrications entre trauma complexe, processus identitaires et mise en place de l’image de soi chez l’enfant errant.

Nous avons entrepris une étude quantitative auprès de 148 enfants ayant séjourné au moins un an dans la rue, en nous focalisant sur la typologie des évènements traumatiques qu’ils ont vécu. Nous avons analysé les liens entre le vécu traumatique et les processus qui participent de la structuration de la personnalité, nos interrogations portant notamment sur les liens entre le trauma complexe, la dynamique identitaire, l’image de soi et l’estime de soi.

Nos observations corroborent de nombreux travaux antérieurs sur les stratégies de survie des enfants en situation de rue. Nous avons mis en évidence la relation entre les traumas complexes de la carrière de rue et le processus d’identisation, et avons postulé une inscription du traumatisme dans la culture à travers l’idée du sens, en faisant, au regard de la manière dont les évènements de vie impactent le développement de ces sujets, une différence entre le trauma agi et le trauma subi.

Many children face adversity in their first years of life and are sometimes forced to a life without childhood. This is the case of some children in street situations. The stress of wandering has an impact on their psychological and emotional development and also on their identification process. The many cases of complex trauma (DESNOS, Disorder of stress not otherwise specified) that these victims exhibit in institutions of socialization, invites us to enter into the clinical psychotraumatology of the street.

After an update on the theoretical controversies that nourish the speculation about the psychological trauma, we will examine the complex trauma and the limitations that appear in the nosology (DSM). The aim of this study is to analyze the complex entanglements between trauma, identity processes and implementation of self-image in the errant child.

We undertook a quantitative study. One hundred and forty-eight children having spent at least one year in the street were included. We focused on the type of traumatic events they had experienced. We analyzed the relationship between the traumatic experience and the processes involved in the structuring of the personality. Our questions included the complex relationship between trauma, identity, self-image and self-esteem.

Our findings support numerous previous studies on the survival strategies of children in street situations. We have highlighted the complex relationship between the trauma of living in the street as a child and the identification process, and have hypothesized an inscription of the trauma in culture through the notion of its meaning, in terms of how life events impact the development of these subjects, a difference between trauma carried out and trauma suffered.